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lundi 30 mars 2009

Qui est de droite, qui est de gauche, en Nouvelle-Calédonie ? Pas si simple !

On a pris l'habitude, en Nouvelle-Calédonie, de penser et de dire qu'être indépendantiste et kanak, c'est être de gauche et qu'être anti-indépendantiste ou loyaliste et non-kanak, c'est être de droite.
Il est vrai qu'être non-kanak (terme qui regroupe donc tous les habitants de Calédonie qui ne sont pas kanak: européens, wallisiens ou futuniens, asiatiques, tahitiens, antillais et réunionnais, etc.), être non-kanak donc, et s'installer dans cette colonie d'outre-mer porte plutôt à droite et qu'être kanak et lutter contre le colonialisme porte plutôt à gauche.
Les médias vont donc évoquer souvent "La Droite Locale" et les Kanak indépendantistes seront affichés de fait à gauche, avec le soutien des gauches exogènes, comme une évidence.
Et pourtant;
Les Indépendantistes sont-ils tous "de gauche" ? N'y-a-il pas des Non-Indépendantistes "de gauche" ? Et des Indépendantistes "de droite" ? Même si certains positionnements peuvent être paradoxaux !
A y regarder de plus près, ce n'est pas si simple, même si la catégorisation initiale peut-être commode !
Il a existé une époque où les superpositions: "indépendantiste/kanak/gauche" et "anti-indépendantiste/blanc/droite" étaient pertinentes et avaient un sens. C'était essentiellement les kanak qui revendiquaient l'indépendance et les non-kanak (blancs, wallisiens et futuniens, etc.) qui luttaient contre, à quelques exceptions de part et d'autre (dont je suis), qui confirmaient donc cette règle.
La revendication d'indépendance puisait sa légitimité dans une vision de gauche voire marxiste du monde tel qu'il était au 20ème siècle.
Dans ce cadre, la lutte pour la liberté sous-tendait l'anti-colonialisme et l'anti-impérialisme et passait par la mise sous tutelle étatique de l'économie; les régimes communistes et socialistes étaient l'expression aboutie d'une théorie de la libération des peuples.
La lutte contre l'indépendance s'arc-boutait quant à elle sur des principes de droite allant d'une volonté colonisatrice voire "civilisatrice" de la domination européenne à des réactions de peur incontrôlées face à un éventuel renversement des rapports de forces.
Dans ce cadre-ci, la lutte pour la liberté sous-tendait l'approche libérale de l'économie sur laquelle s'appuyait  le capitalisme; les régimes démocratiques occidentaux étaient l'expression aboutie d'une théorie de la libération de l'Individu.
Pour faire simple, je dirais que c'était avant les années 90. Au cours de ces années-là (90), en Nouvelle-Calédonie, plusieurs glissements ont commencé à s'opérer sur ces superpositions (la tectonique des plaques politiques en quelque sorte, plaques dont la ligne de fracture reste toujours l'indépendance). L'exercice du pouvoir pour les uns (indépendantistes kanak au Nord et aux Iles), le partage du pouvoir pour les autres (anti-indépendantistes) a corrigé imperceptiblement les catégories:
Des indépendantistes kanak ont mis de la gestion "capitalistique" dans leur gouvernance provinciale; des anti-indépendantistes blancs ont mis du social et l'interventionnisme dans la leur; entre autres, dans la gestion des sociétés d'économies mixtes et des holdings financières provinciales (Sofinor, Sodil, Promosud, ...).
Avec le déroulement un peu lent certes, mais réel, de l'Accord de Nouméa, Notre Pays acquiert de plus en plus d'autonomie et (re) prend possession d'éléments de souveraineté à travers le transfert de grandes compétences. On n'est d'ailleurs jamais allé aussi loin dans l'histoire mouvementée des statuts de la Nouvelle-Calédonie.
Et pour moi, les choses ne sont plus aussi claires qu'il y a vingt ans:
Je ne suis plus sûr du tout sûr que tous les indépendantistes soient réellement "de gauche" et que tous ceux qui se prononcent en fin de compte contre l'indépendance soient systématiquement "de droite". La mise en oeuvre progressive de l'Accord de Nouméa déplace les lignes; en particulier celle de l'acceptation, "de facto", d'une souveraineté partagée avec la France. Avec l'exercice par le Pays Nouvelle-Calédonie de quasiment toutes les compétences de la souveraineté.
"De facto" donc, l'évolution de la société calédonienne et de ses acteurs ne permet plus de les ranger aussi facilement qu'il y a quelques années dans les catégories "de gauche-indépendantiste/de droite-anti-indépendantiste".
Des gens partageant les valeurs, "traditionnellement de gauche", de justice, d'équité sociale, d'égalité entre les peuples, peuvent ne pas vouloir franchir le dernier pas vers l'indépendance !
Des gens souhaitant l'indépendance "à tout prix", peuvent en avoir une vision "droitière" en y recherchant la possibilté de l'utiliser à leur profit particulier ou à celui d'une catégorie particulière de la population et pas spécialement la plus défavorisée (un Kanak qui s'est enrichi - mais force est d'admettre que leur nombre est loin d'être en rapport avec celui des membres riches des autres ethnies- pourrait avoir une vision plus personnelle que communautaire de cet enrichissement) !
Moralité:
Volonté d'enrichissement personnel, de pouvoir et de puissance ne sont pas des "(anti-) valeurs" uniquement occidentales, et en Nouvelle-Calédonie, elles commencent à être largement partagées par des individus de toutes les communautés !

P.S. (Post-Spritum, voyons ! Pas Parti Socialiste !!!). J'ai l'impression que mon billet est un peu compliqué ... Finalement c'est surtout la Calédonie qui est complexe et nous contraint à ces tours et détours intellectuels un peu tordus; toutefois la conclusion (ou moralité) , je la revendique sans détours !

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